Minimal.IA + AI first ≈051
Quelques nouvelles récentes et brèves + un aperçu de la cybersécurité et de la diplomatie américaine à l'heure de l'intelligence artificielle et le risque de fractionnement de l'internet.
Bienvenue sur Myriades,
Vous qui entrez ici… abandonnez toute angoisse ;-). J’y parle d’intelligence artificielle et de technologies digitales en termes simples : infos minimales et explications courtes pour qui n’en fait ni un métier ni un investissement mais souhaite mieux comprendre en quoi « ce truc change tout ».
Minimal.IA
Les femmes sont peu nombreuses aux postes de commande des Big Tech. D’où l’enthousiasme d’Ayesha Khanna face à la slovène Sanja Fidler. VP en charge de la recherche en intelligence artificielle à NVIDIA (qui produit près de 80% des microprocesseurs utilisés dans ce domaine), elle a aussi publié 170 articles scientifiques. Respect.
Vous en avez entendu parler, ne manquez surtout pas la vidéo d’Apple intitulée « Crush » (mot qui veut dire à la fois « coup de coeur »et « pulvériser ») conçue pour nous convaincre des beautés de son nouvel iPad. On y voit une énorme presse écraser tous les outils de la création artistique pour en sortir un iPad ultra fin. Catastrophique. Elle ne dure qu’1min08 qui pourraient conduire à quelques trimestres de troubles pour la marque à la pomme. Mon ami Antoine Brunel y voit « une publicité qui résume tout, car le cerveau humain est lui aussi sous cette même presse ».
Belles promesses : Google DeepMind vient d’annoncer dans un article publié par la prestigieuse revue Nature « AlphaFold 3, un modèle d'IA capable de prédire la structure et les interactions de toutes les molécules de la vie avec précision ». Guillaume Grallet nous explique dans Le Point qu'elle devrait permettre de « mettre au point de nouveaux médicaments, une meilleure production agricole, ou encore tout simplement de mieux comprendre la vie ». Plus prometteur encore, le serveur sur lequel se trouve le modèle est gratuit et ouvert aux scientifiques du monde entier.
Guerre, IA et la nouvelle « diplomatie »
l’iPhone est né en 2007. Il nous a fallu 3 ans à peu près pour comprendre que nos relations avec les autres, l’info, les apps, le web et l’internet passeraient essentiellement par le téléphone. Ce qu’on appelait « mobile first ». C’est, aujourd‘hui, l’intelligence artificielle qui, 18 mois après l’apparition de ChatGPT, est l’élément clé de réorganisation de notre relation au monde. Et je ne parle pas, cette semaine, de comment elle peut permettre de faire des recherches mieux étayées ou d’écrire un texte plus vite.
Levons un peu le nez du guidon. Les Tech@IA (technologies à l’heure de l’IA) sont maintenant partout. Dans notre poche ou notre sac, comme au centre du conflit Chine États-Unis. Les deux super-puissances doivent se retrouver à la fin du mois de mai à Genève pour le premier dialogue sur le contrôle de l'intelligence artificielle en cas de guerre.
Le ministère des affaires étrangères américain (Département d’État) vient, dans cette perspective, de publier un document posant les bases de la Stratégie internationale des États-Unis en matière de cyberespace et de politique digitale.
De quoi s’agit-il ? L’homme qui en est responsable, le premier Ambassadeur pour le cyberespace et la politique digitale, Nathaniel Fick, a posé le problème on ne peut plus clairement dans un entretien au New York Times : « Presque tout le monde est prêt à reconnaître que la technologie est un élément important de la politique étrangère, mais je dirais que la technologie n'est pas seulement une partie du jeu, elle est de plus en plus le jeu tout entier ».
Une nouvelle ère des relations internationales est en train de s’ouvrir. Selon Washington, la planète sera - de nouveau - divisée en deux camps et personne ne pourra échapper au choix puisque technologies digitales et intelligence artificielle se retrouvent à tous les niveaux, qu’il s’agisse de développement, de résilience en cas d’attaque, de protection des câbles sous-marins, des entreprises, des utilisateurs comme de toutes les données que nous gardons dans le cloud.
Anthony Blinken, le Secrétaire d’État, estime qu’il est dangereux d’utiliser des technologies appartenant à des conceptions reposant sur des couches (stacks) différentes. Le monde entier va donc devoir choisir entre l’écosystème proposé par les Américains et celui des Chinois, quelles que soient leurs performances respectives.
« L’ordre international sera défini par le système d'exploitation métaphorique qui dominera » affirme Nathaniel Flick. Formule sibylline autant qu’idéologique. Face à Beijing, peu discrètement mis en cause, le Département d’État mise sur la « solidarité digitale » avec ses alliés.
L’enjeu est bien sûr le « sud global » que la Chine s’efforce d’amadouer en jouant de leur passé colonial commun et, pour beaucoup de leur rejet croissant de l’Occident. Les États-Unis misent, eux, sur le futur promis par leurs capacités technologiques.
Leur avance ne semblant pas devoir être éternelle, ils se dépêchent d’avancer leurs cartes.
En clair, nous entrons dans une période de conflits de plus en plus tendus. Technologies digitales et intelligences artificielles sont essentielles à tous les niveaux de la vie économique, sociale et politique à commencer par la guerre. Habitués à sélectionner des fusils dans un camp et des tanks dans l’autre les pays qui se veulent ou se disent (disaient) « non-alignés » vont devoir choisir à quelle IA se vouer. L’américaine ou la chinoise.
Commentaires :
Dommage collatéral de taille : une telle évolution risque de nous conduire à un fractionnement de l’internet. Tout le contraire de ce dont nous avons rêvé depuis le début des années 1990… sauf les régimes autoritaires qui y gagnent.
C’est le moment choisi par la France pour mettre ses capacités nucléaires au service de l’Europe. Elles sont concernées, mais leur contrôle dépend maintenant de capacités précises en cybersécurité. Ne sommes-nous pas en retard d’une guerre ?
Bien utilisées les intelligences artificielles peuvent contribuer aussi à la résolution des conflits. Qui va s’y mettre ?